énigme 2:
Après les quelques débats (maigres)
suscités par mes interventions dans le forum (fr.misc.droit), personne
ne sait si c'est vrai qu'un patron de magasin ou de bistrot a le droit
de refuser l'entrée sans s'appuyer sur une loi.
Si cette loi n'existe pas, elle ne s'applique
pas. Si elle existe, qu'on me donne les indications me permettant de le
vérifier. J'ai le droit d'exiger ça?
Le mec :
Habitué à marcher pieds nus en toutes circonstances, je
suis aussi habitué aussi à me faire remarquer... Généralement,
on me laisse tout de même faire tout ce que j'ai le droit
de faire.
Il est évident que dans ces circonstances, on peut considérer
que je milite pour la tolérance en matière vestimentaire.
J'espère un peu habituer les gens à admettre les différences,
même VOULUES.
Je suis relativement bien placé pour faire comprendre aux racistes
qu'on peut ressembler à n'importe quoi sans pour autant être
n'importe qui. Sans me vanter je peux affirmer que beaucoup de gens ne
mettraient pas en doute mon intégrité et mes compétences
dans un grand nombre de domaines. Ça aide !
Dans toutes les histoires qui suivent, je n'apparais jamais autrement
que pieds nus. Ça fait belle lurette que je ne mets des chaussures
que très exceptionnellement.
Les "incidents" :
- A part quelques remarques, la première discussion dure remonte
à plusieurs années, à l'hypermarché RALLYE
(à l'époque).
J'arrive pour acheter une connerie, je me fais bloquer par un vigile
à l'entrée de la surface de vente. Ah! J'insiste, je pose
des questions, je menace vaguement, laissant miroiter de graves problèmes
avec la justice... RIEN A FAIRE.
Le vigile de la galerie marchande (entreprise concurrente) s'approche.
Surprise : il me connaît, et il me défend ! J'ai jamais trop
aimé les vigiles, mais bah, ça fait plaisir d'en voir des
calmes. Par contre, l'autre, devant ses arguments, du genre : «fais
gaffe, ce gars-là je le connais, il a des appuis, à ta place
je me méfierais avant de faire des choses illégales à
quelqu'un qui va se rebiffer ...» devant les arguments, il a eu un
haussement d'épaules, en gros: «occupe-toi de ta galerie».
Je demande donc avec insistance qu'on appelle la police, qui, je croyais,
saurait faire respecter la loi. Pas fou, je téléphone à
deux copains, des gens relativement importants, et du moins bien habillés,
et avec des chaussures, qui arrivent illico pour me soutenir. Même
attitude, y compris face aux policiers, qui ne savent pas d'ailleurs quoi
en penser. Discussions stériles et infantiles jusqu'à la
fermeture du magasin... FIASCO
A partir de là, boycott de Rallye. Le nom devient ensuite Casino (Géant), le directeur a changé, et je tente une entrée, on ne me dit rien... puis à nouveau les incidents. (je ne sais quoi penser de cette période...)
- une autre fois, j'accompagne un ami pour le conseiller sur le choix d'un ordinateur. Je lui explique que quelquefois on m'empêche d'entrer, c'est à peine s'il me croit. Eh bien le hasard veut que ce jour ça recommence. Incompréhension, discussion, police, etc. RIEN A FAIRE. Ce jour là j'ai mis des tongues que j'ai toujours dans ma voiture, et nous avons pu acheter. Mais ça fait chier !
- autre incident, autre défense, j'arrive à excéder
tellement le vigile qu'il téléphone à un gros balèze
de la direction. Ce dernier propose que je 'monte le voir' -tout de suite?
-oui! -Où c'est? -par là au fond..
Je monte, me heurte à quelques zélés collaborateurs-empêcheurs
de déranger, finis par exiger qu'on me téléphone le
lendemain, ce qui fut fait. Là on m'explique qu'il est important
que des gens comme moi n'entrent pas, car ils effarouchent les clients
chics. Mais si je préviens à l'avance, on me prêterait
des chaussures pour que je puisse faire mes courses dignement. (je n'ai
pas essayé)
- une autre fois on vient me rechercher dans les rayons.
- et enfin, au moins cinq ou six fois, il ne s'est rien passé, on ne m'a pas vu entrer, je suppose.
- anecdote à Carrefour : un nouveau vigile, qui croit qu'on n'a pas le droit d'entrer pieds nus! Il a appris ça à Géant. Téléphone à son chef, qui lui dit de me laisser passer. Grosse déception! Il en fait une affaire personnelle, et espère un jour pouvoir m'interdire l'entrée. Après plusieurs semaines de doute, il décide qu'il ne peut rien et me le signifie. Non mais !
- et puis récemment, Leclerc fait déborder le vase.
Le 14 avril 1998 lendemain du lundi de pâques. Je rapporte au
service après-vente un article défectueux acheté la
semaine précédente. Échanges plutôt sympa avec
la technicienne, accord sur une date pour récupérer l'article,
merci au revoir. Puisque je suis là, pourquoi je n'en profiterais
pas pour faire quelques courses ?
--Monsieur, vous ne pouvez pas entrer dans le magasin, directives européennes
en matière d'hygiène !
--Ah les salauds, ils ont voté une loi sans me le dire, et qu'est-ce
que l'hygiène a à voir là dedans? Je veux voir cet
article.
--Je sais pas, c'est pas moi, je suis les ordres.
--Appelez votre chef. Chef, etc. etc., même rata... Appelez donc
le chef du chef. OK, le voilà.
--Monsieur, je suis désolé (Sic), vous ne pouvez entrer,
je n'ai pas le droit de vous laisser entrer (et tout et tout ...)
--Eh bien je suis aussi désolé, et vous allez me montrer
cette fameuse loi, à laquelle je ne crois pas.
léger flottement, énervement, nous convenons d'appeler
la police. Mais là c'est la gendarmerie, aïe. Bon, je suppose
qu'ils ne bafoueront pas la loi, pas eux!
--Pendant ce temps, je vais vérifier dans le règlement
intérieur, ils arriveront bientôt.
Je passe assez rapidement sur l'épisode gendarmes. Ils venaient
pour virer quelqu'un du magasin, ils ne réfléchissent pas,
la loi? ah bon? la constitution vous dites, la déclaration des droits
de l'homme, ah peut-être, nous vous savez... et ils ont fini par
partir avant moi.
- samedi 18 avril, je viens récup mon appareil, tout neuf, merci,
vous faites bien votre boulot, oui je me doutais qu'il était foutu,
bon. Puisque je suis là, pourquoi je n'en profiterais pas pour faire
quelques courses ?
--Monsieur, vous ne pouvez pas entrer dans le magasin.
--Ah ça recommence, mais là je suis pas tout seul, j'ai
amené plein de copains, ils voulaient pas me croire, expliquez leur
un peu les raisons européennes et tout ça, ils ont besoin
de comprendre.
--messieurs vous voyez bien qu'il est pieds nus, et que ... c'est sale
Bon, les copains ils comprenaient pas bien, et on a demandé
au chef d'appeler le chef, et j'ai demandé au chef du chef si il
avait trouvé le texte de loi. Comme il s'était rendu compte
que c'était pas possible, il m'a avoué que "non, y'a pas
de texte". A la bonne heure, j'entre donc dans votre sanctuaire. Et voilà
(Comme disent les américains).
-Mais alors les potes, si on allait faire pareil chez géant, peut-être qu'ils arrêteraient de se prendre pour les rois du monde, non? cliquez pour suite
Le procès :
En cours. Enfin, on a accepté de prendre notre plainte, après
quelques difficultés. Le code pénal prévoit, dans
les articles 225-1 et 225-2 une condamnation pour ce genre de personnage
qui subordonne la vente à la bonne tête de ses (éventuels)
clients.
225-1 Constitue une discrimination toute
distinction opérée entre les personnes physiques à
raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de
leur état de santé, de leur handicap, de leurs moeurs, de
leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur
appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à
une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.
suite idem pour personnes morales, et membres de-
225-2 La discrimination définie à
l'article 225-1 commise à l'égard d'une personne physique
ou morale, est punie de 2 ans d'emprisonnement et de 200 000 F d'amende
lorsqu'elle consiste:
1- à refuser la fourniture d'un
bien ou d'un service ;
2- à entraver l'exercice normal
d'une activité économique quelconque ;
3- à refuser d'embaucher, à
sanctionner ou à licencier une personne ;
4- à subordonner la fourniture d'un
bien ou d'un service ;
à une condition fondée sur
l'un des éléments visés à l'article 225-1
Pr pén- 2-1, 2-6, 2-8, 2-10 ; trav
L611-1, L611-6
Les dispositions ne sont pas applicables si ... conforme à des directives gouvernementales prises dans le cadre de sa politique économique et commerciale ou en application de ses engagements internationaux.
Et aussi
L'événement a aussi été couvert
par le télégramme
(un bel article, en page "Finistère"). Merci donc à eux
aussi. L'article a été écrit par Alain Coquil, et
est paru le 4 mai 1998.
Merci à Arnaud Hell, dont la ténacité
et la réputation ne sont pas étrangers au fait que l'affaire
ne soit pas enterrée. Arnaud milite au MRAP (Mouvement contre
le Racisme et pour l'Amitié entre les Peuples)
et a écrit, au nom du MRAP, au Procureur de la République.
Il s'offusque des propos ahurissants tenus par les vigiles du magasin pour
justifier leur attitude.
vendredi 15 mai: je viens de répondre aux
questions d'une journaliste de EUROPE 1. Diable, ça va aller jusqu'où
? Je vous avis pas dit non plus qu'on a vu mes pieds à FR3 Bretagne
? même que ça a été traduit en breton ! International,
je vous dis. Mondial ! Si ça continue, on va plus parler du foot,
à cause des feet !
dimanche 17 mai:
Bon, toujours est-il que je cause dans le poste, on m'a
entendu mardi 19 à 8h15. Si vous avez de quoi écouter
du RealAudio, cliquez pour écouter. (3 minutes,
194 626 octets)
sinon, essayez les différentes versions: page
de tests de sons
Dimanche 14 juin 1998:
J'ai été contacté par une journaliste
de CANAL+. je dois me soumettre aux feux des caméras (sion peu dire)
jeudi prochain 18 juin. Attendons-nous à me voir après ça.
Dans quelle émission? Sont-ils capables de me tourner en dérision?
On verra.
Les contacts -par les news- avec des gens censés
être au courant des lois ont été plutôt décevants.
Tous semblent penser qu'un propriétaire, fut-ce
d'un établissement recevant du public, est maître chez lui,
et qu'il peut refuser l'entrée de son établissement arbitrairement.
La seule précaution qu'il doit prendre, c'est de donner une MAUVAISE
raison. S'il ne donne aucune raison, tout va bien. Je ne pense pas que
ce soit vrai.
Mais si quelqu'un pouvait me soutenir que c'est faux,
avec textes à l'appui, ça m'arrangerait bien. (mailto:henri@infini.fr).
Mon fan-club ne s'étoffe pas beaucoup. J'ai eu des messages sympas, mais pas vraiment de volonté de figurer dans ces pages.
Je téléphone au commissariat, puis au Palais de justice, pour réclamer copie de ma déposition. Voir énigme 1
16 juin 98, je réclame copie de ma déposition:
"J’ai déposé plainte
au commissariat de police de Brest le 4 mai 1998, pour un refus de vente
dû à une discrimination.
Je désire connaître l’état
d’avancement de mon affaire (PV 98-5982 transmis le 6 mai)
De plus, je n’ai pas de copie de la déposition
que j’ai faite le 4 mai. Pouvez-vous me la transmettre ?
Vous remerciant par avance,
Henri Boitier"
mercredi 18 juin 98:
lettre du tribunal: "infraction insuffisamment
caractérisée". (voir le texte chez les défaitistes!)
Le 24 juin j'écris une lettre:
"J’ai pris connaissance de votre
décision de ne pas donner suite à ma plainte.
La raison : « infraction insuffisamment
caractérisée », ne me paraît pas explicite. Je
vous serais gré de m’éclairer sur quelques points :
Quelle est l’infraction présumée
?
Puis-je toujours prétendre entrer
pieds nus dans le magasin incriminé ?
Quels droits donne la loi au propriétaire
d’un établissement recevant du public en ce qui concerne le filtrage
des clients ?
De plus, je vous renouvelle ma demande
de recevoir une copie de ma déposition au commissariat (voir mon
courrier du 16 juin).
Je vous prie d’agréer, Monsieur,
l’expression de mes sincères salutations.
Henri"
Le 1er juillet je recommence:
"J’ai déposé plainte
au commissariat de police de Brest le 4 mai 1998, pour un refus de vente
dû à une discrimination.
Je désire recevoir copie de la déposition
que j’ai faite le 4 mai. Pouvez-vous me la transmettre ?
Vous remerciant par avance,
Henri Boitier"
Le 10 juillet on me répond:
comme suite à votre demande, j'ai l'honneur
de vous prier de bien vouloir me faire parvenir la somme de 27 francs
correspondant au coût de la pièce réclamée
(9 pages à 3F)